Liquidation du Statut de la Fonction publique: ce que contient le projet de loi adopté par l’Assemblée Nationale ce mardi..

 Les neuf organisations syndicales dénoncent un alignement sur le privé au détriment du Statut.

Huit d’entre elles (hors CFDT) ont organisé un rassemblement aux abords de l’Assemblée avant le vote. Le secrétaire général de FO Yves Veyrier a réclamé que le gouvernement entende le « rejet unanime » de ce texte.

Le projet, qui concerne les 5,5 millions d’agents dans les trois versants (Etat, Territoriale et Hospitalière), vise, selon le secrétaire d’Etat Olivier Dussopt à « moderniser » le statut de fonctionnaire et l’adapter aux « attentes » de la société. Cela passe notamment par l’élargissement du recours aux contractuels (déjà au nombre d’un million) qui doit rendre l’administration « plus attractive et plus réactive », mais aussi par des mobilités facilitées, un dispositif de rupture conventionnelle, un « contrat de projet » sur le modèle du privé ou encore un dialogue social « simplifié » avec une refonte des instances…

Le texte a été voté à l’Assemblée nationale par 351 voix contre 156 et 53 abstentions ce mardi 28 mai.

Voici les principales dispositions du projet de loi de “transformation de la fonction publique” soumis au vote ce mardi 28 mai…

Recours aux contractuels et “contrat de projet”, = liquidation du Statut de fonctionnaire

Afin notamment de “diversifier les viviers de recrutement”, la fonction publique pourra embaucher davantage de contractuels, y compris pour des postes de direction.

Ces agents, qui n’ont pas le statut de fonctionnaires, représentent déjà environ 20% des effectifs dans les trois versants (État, Territoriale et Hospitalière). Le gouvernement affirme n’avoir prévu “ni quotas, ni planchers, ni plafonds” et souligne que le “principe général d’occupation des emplois permanents par des titulaires” est maintenu.

Sur le modèle du secteur privé, un “nouveau type de contrat à durée déterminée”, “le contrat de projet”, est créé pour des “missions spécifiques”. D’une durée minimale d’un an et maximale de six ans, il n’ouvre droit ni à un CDI, ni à une titularisation. Une indemnité est prévue en cas de rupture anticipée. Les députés ont exclu les catégories C, les moins bien payées, de ce dispositif.

Ils ont aussi voté le principe de l’instauration d’une prime de précarité pour certains contrats courts. Visant des CDD de moins d’un an (70% des CDD), elle pourrait s’appliquer, à compter de 2021, jusqu’à un salaire équivalent à deux Smic (pour un coût de 400 à 600 millions d’euros par an).

 

Dialogue social: instance unique

Comme pour le privé avec les ordonnances travail, le texte dote la fonction publique d’une instance unique de dialogue social: le comité social d’administration (CSA), issu de la fusion des comités techniques (CT) et d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) actuels.

Le texte prévoit également un “recentrage” des compétences des commissions administratives paritaires (CAP): leur avis préalable sur les questions liées aux mutations et aux mobilités, à l’avancement et aux promotions est “supprimé”. Elles seront désormais réservées aux situations exceptionnelles (procédures disciplinaires, recours…). En contrepartie, un accompagnement par un représentant syndical est prévu pour les agents demandant un recours en cas de décision défavorable.

Mobilité et “détachement d’office”

Le texte entend favoriser la mobilité au sein de l’administration ou vers le privé. Il prévoit des incitations comme “l’accompagnement personnalisé” en cas de suppression de l’emploi. Des mesures sont également prévues sur le compte personnel de formation, garantissant la portabilité des droits entre public et privé.

En cas d’externalisation du service, il instaure un “détachement” automatique vers le privé ou un organisme de droit public gérant un service public industriel et commercial.

Rupture conventionnelle!

Le texte s’inspire également du privé pour instaurer “un mécanisme de rupture conventionnelle, aligné sur le code du travail”. Il prévoit cependant une expérimentation sur 5 ans à compter du 1er janvier 2020.

Le texte précise que la rupture “ne peut être imposée par l’une ou l’autre des parties” et inscrit le principe d’un montant minimum de l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle.

Temps de travail, salaires, déontologie…

Le projet impose les 35H effectives dans la fonction publique et abroge les régimes horaires particuliers existant dans les collectivités. La règle ne s’appliquera pas aux enseignants qui déjà “travaillent largement (au niveau de) la durée légale”, selon le gouvernement.

– Il transpose l’accord du 30 novembre 2018 relatif à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. Des plans d’action devront notamment être mis en oeuvre. Les femmes enceintes seront exonérées du jour de carence, en cas d’arrêt de maladie.

– Les députés ont prévu un rapport annuel sur le montant moyen des rémunérations versées aux “1% d’agents les mieux rémunérés”.

– La commission de déontologie des fonctionnaires va fusionner avec la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP). Jusqu’alors placée sous l’autorité du Premier ministre, l’instance va ainsi se transformer en “autorité administrative indépendante” émettant des avis sur le “pantouflage” (départ dans le privé) et le “rétro-pantouflage”. Certains avis pourront être publiés.

– Le gouvernement est habilité à prévoir par ordonnance un code de la fonction publique.

Harmonisation de l’échelle des sanctions dans les trois versants de la fonction publique

– Possibilité de concours national à affectation locale, mesure réclamée notamment en Outre-mer