La gestion du COVID-19 à l’Education nationale ne doit pas être un prétexte à la déréglementation généralisée
Suite à l’allocution du Président de la République le 12 mars, le Ministre de l’Education nationale a souhaité rencontrer les organisations syndicales ce vendredi 13 mars.
En tout premier lieu, le Ministre de l’Education nationale a tenu à préciser que la décision permettrait de tenter une diminution du risque de contagion.
A la différence du Président de la République, il précise qu’aucune école, ni collège ni lycée ne seront fermés. Le Ministre a indiqué que « Lundi, les écoles, les collèges, les lycées ne seront pas fermés. Les personnels de direction et les professeurs seront présents autant que de besoin. »
Sur le plan juridique, l’arrêté qui sera publié (samedi 14 mars) au Journal Officiel par le Ministre de la Santé précisera la décision de mettre « fin à l’accès aux écoles et établissements pour les élèves, sauf exception ».
Pour FO, c’est incompréhensible
Hier le Président de la République annonce la fermeture des crèches, des établissements scolaires, et des universités.
Il parle de « la plus grave crise sanitaire que la France ait connue depuis un siècle. » Il en ressort que l’ensemble des salariés sont en danger grave et imminent. Et ils sont extrêmement inquiets.
Leur première réaction est de se dire : « si je dois aller au travail, prendre les transports, ma santé et ma sécurité doivent être préservées ». C’est vous, Monsieur le Ministre, qui en êtes responsable et par conséquent vous devez donner une consigne claire, nationale, à tous les recteurs et tous les DASEN indiquant que tous les personnels des écoles, établissements, services déconcentrés ainsi qu’au ministère ne doivent pas se rendre sur leur lieu de travail.
Vous annoncez une modification majeure de l’organisation du travail, dans ce cas, nous ne comprenons pas pourquoi le CHSCT ministériel n’est pas convoqué dès lundi.
Il y a une grande confusion dans les écoles, les établissements et les services des rectorats. Tous sont en ébullition : tous les personnels, notamment les personnels de direction, les gestionnaires, les directeurs d’école sont assaillis ce matin de questions auxquelles ils ne peuvent pas répondre.
Se rendre sur son lieu de travail ? Pour faire quoi ? Pour quelles missions ?
Le ministre ne donne aucune consigne claire
Que ce soit sur les modalités du télétravail, sur les activités dans les établissements scolaires, ou sur les mesures de sécurité, le Ministre renvoie toutes les décisions au niveau local, à l’appréciation des chefs d’établissement, des directeurs d’écoles et des IEN. En conséquence, d’une académie à l’autre, d’un département à l’autre, voire d’un établissement à l’autre, les personnels reçoivent des consignes contradictoires : ici, tous les personnels sont convoqués, là, seuls qui n’ont pas d’enfants. Dans un département, les personnels doivent venir avec leurs enfants…
Il est important de noter que seules la métropole et la Corse seront concernées par cet arrêté. La décision de ne pas étendre l’arrêté aux autres territoires est conditionné au fait « qu’ils ne sont qu’au stade 1 ou 2 ». C’est donc pour tous les personnels y travaillant des décisions au cas par cas, comme cela a été pour les arrêtés concernant l’Oise ou le Haut Rhin par exemple.
Les collectivités d’Outre-Mer font-elles encore partie de la République une et indivisible pour le gouvernement ?
« Esprit d’engagement » ou maintien des droits et garanties ?
- Pour le Ministre, « l’image de marque de l’Education nationale est en jeu ». C’est par le sacrifice de tous les personnels qu’il s’agit de défendre ces décisions car nous sommes sur le « devant de la scène, devant les yeux de la société ».
Dans cette situation, des agents de l’Education nationale seraient responsables d’assurer la continuité du service public.
Mais quid de l’obligation de notre employeur de veiller à la santé, la sécurité et aux conditions de travail ? Si un personnel venait à contracter une maladie, cela serait-il reconnu comme maladie professionnelle et donc imputable au service ?
Comment notre employeur peut-il nous assurer le même traitement ? Pour seule réponse, le ministre a mis en avant la recherche d’un « équilibre entre le droit, les principes et la situation de chaque territoire ». Pour Force Ouvrière, il ne suffit pas de dire que tout sera fait pour « éviter les injonctions contradictoires et que le bon sens sera présent partout ».
- Dans chaque région, les recteurs et directeurs d’ARS travaillent ensemble afin de définir les besoins des personnels des hôpitaux pour leurs enfants. En effet, un Service Minimum d’Accueil sera mis en place pour tous les élèves de la maternelle à la classe de 4ème à raison de 8 à 10 élèves par classe.
Ce service devrait être mis en place dans les écoles et collèges à proximité des hôpitaux. La FNEC FP-FO a indiqué que ce n’étaient pas aux directeurs, ni aux personnels de direction d’établir la liste de ces enfants.
- Les représentants de la FNEC FP-FO ont demandé l’assurance de ne pas voir décompter les jours d’autorisation d’absence pour garder les enfants à domicile, et fait préciser que dans cette situation, il ne pourra être fait appel au personnel concerné pour lui demander d’effectuer du télétravail.
- Concernant les personnels AED et AESH, la FNEC FP-FO exige qu’ils ne soient pas utilisés pour d’autres missions que celles figurant dans leurs contrats. Plus particulièrement pour les AESH, s’il n’y pas d’élèves notifiés MDPH, l’administration n’a aucune raison d’exiger leur présence.
- De la même façon, ils se sont assurés que tout le salaire, y compris HSA, primes, et indemnités, sera maintenu.
- Le Ministre a répondu à la demande de Force Ouvrière de faire parvenir aux recteurs et IADASEN un courrier demandant le recensement des personnels à risque et donc particulièrement exposées. Ainsi, et à titre conservatoire, ces personnels seront protégés en ne venant pas dans les écoles et établissements.
- La FNEC FP-FO a demandé en plus que ces personnels puissent bénéficier d’un suivi médical.
- Pour tous les personnels, la FNEC FP-FO a demandé le respect des Obligations Réglementaires de Service, y compris pour les personnels du CNED : aucune augmentation du temps de travail !
Une déréglementation et un chaos sciemment organisés
Le ministre a rappelé que le gouvernement a envisagé le recours à l’article 16 de la Constitution, qui confère au Président de la République les pleins pouvoirs pour prendre des mesures d’exception. « Ce n’est pas business as usual » a-t-il ajouté. En bref, les circonstances exceptionnelles justifieraient un droit local exceptionnel.
Pour la FNEC FP-FO, le virus ne doit pas être un prétexte pour accélérer la déréglementation, pour faire tout et n’importe quoi, mettre en place des règles locales, et mettre en danger la santé et la sécurité des personnels.
Nous ne sommes pas « le petit personnel » de Macron – Blanquer
Des personnels sont appelés à se rendre sur leur lieu de travail dès lundi sur un simple coup de téléphone. Depuis le début de la crise sanitaire, malgré des cas avérés d’infection, les droits de retrait sont systématiquement refusés : c’est scandaleux.
D’autres sont appelés à faire du télétravail en dehors de tout cadre réglementaire, au mépris du décret du 11 février 2016 qui précise que le télétravail doit se faire sur la base du volontariat, avec la fourniture de matériel.
Le virus n’arrêtera pas les revendications
Les propos lénifiants du ministre sur « le bon sens », « le civisme » ou la « résilience » n’ont pas rassuré Force Ouvrière.
Les personnels n’oublient pas que c’est à l’occasion d’un Conseil des ministres destiné à faire face à la maladie qu’il a dégainé l’arme du 49.3 pour imposer, « au nom de la démocratie », une réforme des retraites rejetée par l’immense majorité.
Augmentation des salaires, retrait de la réforme des retraites, rétablissement des postes supprimés, respect des missions : nous ne lâcherons rien !
La FNEC FP-FO condamnera toute tentative d’utiliser la crise sanitaire pour remettre en cause les libertés fondamentales.
La FNEC FP FO l’heure est à la réunion des personnels, dès lundi, pour réaffirmer les revendications, exiger le maintien de leurs garanties statutaires, faire leurs droits en matière de santé et de sécurité au travail. Elle invite les personnels à compléter le Registre Danger Grave et Imminent en collaboration directe avec les représentants FO des CHSCT. Le droit de retrait doit s’appliquer à tous les salariés.
Elle appelle ses syndicats à continuer de réunir leurs instances, à organiser réunions et assemblées générales des personnels pour discuter et décider de l’action efficace pour les revendications.
Montreuil, le 13 mars 2020